Chacun des quatre évangiles nous rapporte la mission du Royaume de Jésus de manière légèrement différente. (Au fait, Marc, nous dit-on, était un Juif né et ayant grandi en Libye, en Afrique) commence l’histoire de Jésus avec le message de Jean le Baptiste. Cela a été fait pour nous rappeler que les prophètes avaient déjà annoncé la venue du ministère de Jésus. Matthieu remonte jusqu’à Abraham (Matthieu 1:1), de qui la nation d’Israël tire ses racines, pour nous rappeler que Jésus est venu pour accomplir ce qu’Israël n’avait pas réussi à faire dans le monde: étendre le Royaume de Dieu à d’autres nations et, par conséquent, ils se sont retrouvés en captivité à Babylone et après leur retour, ils étaient à nouveau sous le règne romain. Dans son évangile, l’évangéliste Luc va plus loin que Matthieu. Il commence l’histoire de notre salut avec Adam. Jésus dit que la bonne nouvelle de Jésus est pour toute l’humanité (pas seulement pour le peuple juif). Jean commence l’histoire de Jésus en nous renvoyant au temps avant la création – Jésus est la Parole Eternelle, non créée, de Dieu qui existait avant la création et a toujours été avec Dieu. Ceci nous aide à répondre à la question: ‘Le Royaume a-t- il commencé lorsque Jésus est venu physiquement sur terre ?’ Non. En fait, Jésus est venu pour restaurer le Royaume de Dieu longtemps donné aux Juifs. Et c’est pourquoi Jésus les exhorte à se repentir et à croire à la Bonne Nouvelle (Marc 1:15). Il leur dit qu’ils ne doivent plus attendre l’accomplissement futur des prophéties messianiques annoncées par les prophètes.
Il convient de souligner que bien que les Juifs soient retournés de leur captivité babylonienne, ils continuaient à se considérer en exil, étant donné qu’ils étaient désormais soumis au règne romain et privés de leur liberté. Les Juifs anticipaient avec ferveur l’avènement de l’ère nouvelle, celle qui annoncerait le retour éclatant de la divine splendeur, jadis résidant en leur temple sacré de Jérusalem. Le Livre d’Ésaïe (40:10-11) prophétise l’avènement d’un Messie aux multiples facettes: d’une part, Il se présente comme un guerrier intrépide, prêt à affronter les ennemis d’Israël, et d’autre part, Il incarne la bienveillance et la sollicitude d‘un berger qui guide son peuple avec tendresse et amour vers sa gloire perdue. Ce passage évoque avec force la puissance et la vigueur du Messie (‘Il vient avec puissance’, ‘gouverne d’un bras puissant’), tout en soulignant les soins délicats et la direction qu’Il offre à son troupeau, le comparant ainsi à un berger attentionné (‘il conduit son troupeau comme un berger’). Ces passages d’Ésaïe, mal interprétés par les Juifs, ont façonné chez eux une vision déformée du Royaume de Dieu et des actions que le Messie accomplirait en faveur d’Israël. Ils ont faussement envisagé que le Messie les conduirait vers l’indépendance politique, la paix civile et la prospérité personnelle.
Pour les Juifs, le Messie était en partie divin et en partie humain, ce qui en faisait un homme hors de l’ordinaire. Cette perception ne décrivait pas suffisamment Jésus, car Il n’était pas seulement un homme; Il était le Fils de Dieu, donc Dieu, et égal au Père. Cependant, Il s’est dépouillé en venant sur terre, comme nous le dit Philippiens 2:6-7:« Lequel, existant en forme de Dieu, n’a point regardé comme une proie à arracher d’être égal avec Dieu, mais s’est dépouillé lui-même, en prenant une forme de serviteur, en devenant semblable aux hommes; et, ayant paru comme un simple homme, il s’est humilié lui-même, se rendant obéissant jusqu’à la mort, même jusqu’à la mort de la croix. »
Leur perception erronée de ce que le Messie devrait être pourrait expliquer en partie la multiplication des faux messies qui sont apparus avant l’époque de Jésus, sous le règne romain. Ces figures surgissaient en réaction aux bouleversements politiques et sociaux de l’époque, promettant souvent la libération du joug romain ou la restauration de la souveraineté juive. Cependant, elles ont échoué dans leurs tentatives, leurs mouvements étant souvent confrontés à l’opposition et à la répression des autorités romaines. Ces mouvements risquaient également de se transformer rapidement en révoltes armées, défiant directement le pouvoir romain et suscitant troubles et violences. Lorsqu’ils ne correspondaient pas aux critères des Écritures juives ou contredisaient le judaïsme traditionnel, ces prétendus messies étaient souvent considérés comme de faux prophètes et subissaient des arrestations et des exécutions. Quelques exemples notables incluent Simon Bar Kokhba, à la tête de la révolte (132-136 de notre ère) contre la domination romaine, et Simon le Magicien, mentionné dans les Actes des Apôtres 8, qui était un sorcier samaritain prétendant être quelqu’un de grand et ayant même tenté d’acheter le pouvoir du Saint-Esprit aux apôtres. Judas de Galilée (non Iscariote) fut également un chef de révolte contre la taxation romaine autour de la naissance de Jésus, tandis que Theudas, mentionné dans les Actes des Apôtres 5:36, se présenta comme un Messie autoproclamé ayant mené une révolte contre l’autorité romaine au Ier siècle de notre ère. C’est dans ce même contexte que Gamaliel, un maître de la loi respecté et honoré par tous, pris la parole devant le Sanhédrin, alors déterminé à entraver les apôtres, et les a exhortés ainsi : ‘Arrêtez- vous. Si le Royaume que ces gens prêchent est authentique, il perdurera. Sinon, les erreurs ne demeureront pas éternellement cachées, nous les découvrirons comme nous l’avons fait avec les faux messies avant eux’ (Acts 5:33-40).
Revenons maintenant à la mission du Royaume du Seigneur et disons: À l’heure fixée par Dieu, Lui, le véritable Messie, est apparu (Galates 4:4). Contre toute attente, Jésus ne répond pas aux attentes du peuple juif. Au lieu d’adopter une posture de champion militaire, Il se révèle aussi doux qu’un agneau (Jean 1 :29). Son intention n’est pas d’abolir la séparation entre Juifs et Romains (qu’Il n’imagine même pas être ses ennemis), mais plutôt d’éliminer la barrière entre toute l’humanité et Dieu. Son œuvre est spirituelle et non charnelle. Cependant, cela ne satisfait pas le peuple juif, qui commence à se demander si l’Homme est véritablement le Messie tant attendu. Ce qui devrait nous alerter le plus, c’est le fait que les Juifs ont lamentablement échoué à étendre le Royaume de Dieu aux autres nations, raison pour laquelle il est venu apporter l’espoir et la restauration à Israël et au monde. Hélas ! Ils rejettent à nouveau leur Messie et s’apprêtent à le tuer, comme ils l’ont toujours fait avec les prophètes (Matthieu 23:31; Actes 7:52). Ainsi, le Seigneur, s’adressant à la foule qui l’entoure ainsi qu’aux chefs religieux de son époque, leur annonce les conséquences de leur rejet de son enseignement et de sa mission: ‘C’est pourquoi je vous dis que le royaume de Dieu vous sera enlevé et sera donné à un peuple qui en produira les fruits’ (Matthieu 21:43). Les Juifs croyaient que le royaume de Dieu leur appartenait de droit, mais malheureusement, ce royaume n’est pas héréditaire. Rien d’autre ne nous qualifie pour y entrer, si ce n’est la foi en Dieu. Nous, autrefois appelés gentils, sommes entrés de manière inattendue dans la maison des Juifs comme par accident grâce à la bonne nouvelle. Ainsi, le royaume de Dieu nous est aussi moins lié s’il n’est pas enraciné dans la vraie piété. La menace de notre Seigneur doit être prise au sérieux : tous ceux qui profanent le royaume de Dieu, comme les enfants du grand prêtre Eli l’avaient fait, en seront privés. Ainsi, la perpétuité de ce royaume, décrite ici, peut apporter du réconfort seulement à ceux qui marchent dans la justice. Par ces paroles, le Christ nous assure que, bien que les faux ministres de Dieu aient détruit le vrai culte de Dieu parmi eux-mêmes, ils ne pourront jamais effacer le nom du Christ, ni éteindre la vraie foi, ni la vraie adoration en esprit et en vérité. Le Grand Dieu, dont appartiennent toutes les extrémités de la terre et que nous invoquons dans nos prières, veillera à ce que si le Nord profane son Royaume, le Sud l’honore. Dieu aura toujours une demeure pour son royaume quelque part. Nous ne devons pas cependant oublier que partout où l’Évangile du Royaume est prêché, il portera ses fruits: il fera des disciples pour Jésus-Christ, car Dieu ne permettra jamais que le royaume si beau et si grand de son Fils bien aimé reste sans témoins.